Pendant le Festival de la poésie de Montréal Florentine Rey été interviewée par Nathalie Buchot dans le cadre de ses correspondances géopoétiques. La géographe, philosophe et poète qui a su bien retranscrire leur échange dans un long entretien. Il est question de potentiels,
de liberté, de la poésie comme une phénoménologie pour apprendre et comprendre le monde, et du fait que
la parole poétique n’appartient pas qu’aux poètes.
EXTRAIT :
” L’écriture, c’est toucher à quelque chose qui n’a ni commencement ni fin. C’est une ampleur qui s’inscrit dans une durée, au-delà du temps Chronos. À chaque livre, je fais un nouveau pas et ce qui s’ouvre devant est immense. Il y a de nouvelles possibilités, du potentiel. Or, le potentiel m’intéresse, le potentiel des choses, le potentiel des gens, le potentiel des mots, le potentiel du corps. Avec l’écriture et le travail sur la parole et les mots, les potentiels se révèlent. Souvent, on utilise la langue de façon plutôt matérielle, factuelle. On a peu de vocabulaire pour dire les odeurs, les sensations, le toucher. La poésie, c’est de se réconcilier avec ses cinq sens. C’est le dérèglement de tous les sens dont parle Rimbaud. Nous sommes des êtres incarnés et sensibles. Profitons-en. Ne restons pas dans nos têtes avec des choses apprises et connues. Risquons-nous ! Être poète, c’est prendre le risque d’être pleinement vivant. Je crois que le poète, la poète ou la poétesse essaient d’être un trait d’union entre l’esprit et la matière.”